Tous les efforts que les hommes mettent dans les choses de cette vie sont comme les jeux des enfants avec le sable : le plaisir qu'ils trouvent dans ces jeux cesse dès qu'ils cessent d'y travailler, car dès qu'ils cessent d'y travailler, le sable, glissant sur lui-même, ne laisse plus aucune trace du travail que les enfants y ont mis.
C'est la vie humaine : le sable c'est l'ambition, le sable c'est le pouvoir, le sable c'est la richesse, le sable c'est tout ce qui nous permet de rechercher le plaisir de la chair. Les âmes puériles qui s'attachent vainement à ce qui n'a pas de substance et se soumettent à tant de peines pour chacune de ces choses, si seulement elles abandonnaient le lieu de sable, c'est-à-dire la vie selon la chair, reconnaîtraient combien il est vain de passer la vie de cette manière. […]
A mon avis, même le grand Ecclésiaste parle de cela comme de quelqu'un qui s'en était déjà éloigné et qui s'était embarqué, avec une âme dépouillée, dans la vie immatérielle. Il est probable qu'un jour nous aussi parlerons ainsi, lorsque nous serons loin de cette plage où le sable est ce que rejette la mer de la vie, lorsque nous nous serons éloignés de toutes les vagues qui tonnent et rugissent autour de nous, et de la mer que nous avons connue autrefois, nous n'emporterons avec nous que le souvenir de ce que nous avons peiné là-bas ; alors nous dirons ces paroles : « Vanité des vanités, tout est vanité », et encore : « Quel profit l'homme a-t-il retiré de tout son travail sous le soleil ? »
Grégoire de Nysse
Homélies sur Qohelet vers 381