Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair

« Les chrétiens se répartissent dans les cités grecques et barbares suivant le lot échu à chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour le vêtement, la nourriture et la manière de vivre, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle… Toute terre étrangère leur est une patrie et toute patrie une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont des enfants mais ils n’abandonnent pas leurs enfants. Ils partagent tous la même table, mais non la même couche. Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre mais sont citoyens du ciel ».

…………«Dieu dit: Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance» (Genèse 1)—« Le verbe de Dieu est devenu homme, afin que tu apprennes de l’homme comment l’homme peut devenir Dieu » Clément d’Alexandrie (Protreptique, I,8,4)— « Le verbe de Dieu qui à cause de son surabondant amour, s’est fait cela même que nous sommes afin de faire de nous cela même qu’Il est » Irénée (Ad haer. ,V,Paef.P.G.,7 COL. 1120)— « Dieu s’est fait porteur de la chair, pour que l’homme puisse devenir porteur de l’Esprit », Athanase ( De inc. Verbi,8)— « Dieu le Verbe nous a donné les prémices de l’Esprit-Saint, afin que nous puissions devenir des dieux à l’image du Fils de Dieu » Athanase, (P.G., 26,997 A)— « Dieu a créé le monde pour y devenir homme et pour que l’homme devienne Dieu, par grâce, et participe ainsi aux conditions de l’existence divine », Maxime le confesseur ( De incarnatione)— « Il est devenu homme à cause de toi, en sorte que toi, par lui, tu deviennes Dieu » Grégoire le théologien (Discours,XL)
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vendredi 24 janvier 2025

Comment les gens basculent-ils dans l'illusion spirituelle?

par l'Archimandrite Ambrose (Yurassov). 
"De la foi et du salut".


Savez-vous, avec quel vice le diable nous attrape  dans ses filets? 

    En 1978, j'ai baptisé une femme et je lui ai donné une règle : ce qu'elle devait lire et ce qu'elle devait faire. Je lui ai dit: "Dis la prière de Jésus 500 fois par jour, fais 50 grandes métanies". (Cette femme avait déjà fréquenté l'Église; une fois, je le lui ai demandé et j'ai appris qu'elle avait été baptisée non à l'Église orthodoxe mais à l'Église catholique). Au bout de quelque temps, elle arrive et me dit : "Permettez-moi de faire plus de métanies". - "Alors, dis-je, fais 100 métanies". —"Est-ce que je peux dire la prière de Jésus 1000 fois?" - "Tu peux. Que Dieu te bénisse". 
    Au bout de quelque temps, elle est revenu et elle m’a demandé l’autorisation de faire 3000 prières de Jésus. Je le lui ai permis mais j’ai demandé: "As-tu assez de force?" - "J'en ai". Et c'est tout. 
    Nous nous voyions une ou deux fois par an. Elle arrivait, elle gardait toujours le silence, elle était absorbée dans sa prière. Elle ne parlait presqu’à personne. Elle arrivait et repartait comme ça. 
     Et puis, un jour (c'était au village de Krasnoïe) nous nous sommes réunis pour la Fête de Sainte Nathalie. Il y avait à peu près huit femmes avec le prénom Nathalie. Cette femme a pris place à table avant tout le monde et elle s'est assise sous les icônes. Je lui demandé de céder sa place, et d'en prendre une autre. Elle s'est vexée et elle a quitté la fête. Plus tard, je lui ai parlé et ceci pendant environ deux heures, je lui ai demandé pourquoi elle s'était vexée. Elle m'a dit: "- Vous m'avez offensée, vous m'avez déshonorée devant tout le monde! - Il n'y a pas de déshonneur ici lui ai-je répondu. Ce n'est pas le jour de ta Fête, tu devais céder ta place à celle dont c'était la Fête." Et alors, pendant la conversation je lui ai demandé: "- Dis-moi, comment pries-tu?"  J'ai appris qu'elle faisait 1000 métanies tous les jours sans bénédiction; si elle était en route et y manquait, elle faisait 2000 métanies, avec la prière de Jésus, avec  larmes. J'ai appris qu'elle dormait deux heures par jour. Le lundi, le mercredi et le vendredi, elle ne mangeait rien du tout, elle ne buvait rien, mais le mardi, le jeudi et le samedi, elle mangeait une fois par jour. 
    Si vous la voyiez ! Elle était forte, robuste ; quand elle venait nous voir, elle portait un grand sac-à-dos, et cela pour faire dix kilomètres à travers champ. On ne la voyait aucunement accablée. 
     Une  fois précédente, quand nous étions tous à table, elle avait manifesté une telle grâce, un tel amour pour le Seigneur et pour tout le monde qu'elle était prête à embrasser tout le monde. Elle ne sentait pas son corps, toute son âme et tout son corps étaient pleins d’amour pour le Seigneur. Je me demandais : "Qu'est-ce qu'elle a? Quelque chose de spécial?" 
     Et voilà, à Krasnoïe, quand on lui a demandé de céder la meilleure place, on a vu ce que c'était. Tout est devenu clair ! Elle a éprouvé une telle colère, une telle offense qu'elle ne voulait même pas parler: "- Vous m'avez déshonoré devant tout le monde!"  Mais le Christ dit : "Ne va pas t'asseoir à la meilleure place. Il se peut en effet que quelqu'un de plus important que toi ait été invité" (Luc, 14 : 8). Pourquoi est-ce que je le dis? 
    Une telle personne est sauvée d'une manière compliquée, très compliquée. Le prophète David dit : "Le Seigneur défend les petits: j’étais faible, il m’a sauvé" (Ps. 114). Celui qui a abattu son orgueil, est déjà sauvé. Il ne faut pas tellement de métanies, il ne faut pas tellement de prières ; la personne est déjà sauvée. Métanies, veilles, exercices d'ascèse, ce n'est pas un but mais une voie vers la repentance. Avec ces moyens, l'homme humilie sa chair, il prie le Seigneur de le faire venir à la repentance pour qu'il soit comme un petit enfant, doux, calme, équilibré. Aimer tout le monde, faire du bien à tout le monde. 
    Ces exercices d'ascèse, elle s'en est chargée sans bénédiction, selon sa propre volonté, par orgueil. Quand les gens pareils vivent de leur propre autorité, ce n'est pas l'esprit de ferveur Divin, mais l'esprit du Diable qui les habite. 
    Ensuite, il y a eu d'autres choses. Elle a même tenté de se suicider. Elle a avalé des comprimés. Heureusement, elle a commencé à vomir, elle est restée demi-morte pendant quatre heures. Elle est revenue à la vie avec peine. Voilà où mènent ces "exercices d'ascèse". 
    Quand je lui ai permis à nouveau de faire 50 petites métanies et 500 prières de Jésus, de manger tous les jours comme tout le monde mange, elle n'a pas pu le faire. Elle a dit : "- Je ne peux rien: ni métanies, ni prières, rien du tout. Et je ne peux même pas dire ni les prières du matin, ni les prières du soir". Et elle a commencé à manger beaucoup. Je lui ai dit: "- Tu vois, il t'est arrivé quelque chose de nettement démoniaque." Beaucoup de nos sœurs l’entendaient dire, comme par hasard et à maintes reprises : "Je fais des exercices d'ascèse", "Je fais 1000 métanies par jour", "Je ne mange pas trois jours par semaine", "Je dors deux heures par jour", elle disait tout cela avec malice. Cela signifiait déjà quelque chose comme  : "Tous sont mauvais, moi seule, je suis bonne". 
    C'est un critère pour savoir si la personne est dans  l'illusion spirituelle. On lui en parle, elle n'y croit pas : "Tu es méchant!"va-t-elle dire. Alors, il faut se sauver non par le labeur, mais par la sagesse. À l'église, au monastère, partout, l'obédience doit être à la première place. Il faut faire tout par obéissance. Retenez ce que je vous ai dit...

mardi 8 mars 2011

Contrôle, maîtrise, dépendance, ou abandon, confiance et obéissance...


Jusqu'à un certain âge - qui varie selon les personnes - nous avons le sentiment qu'il nous faut avoir la maîtrise de notre vie, que nous faisons des choix déterminants pour notre avenir, qu'il ne nous faut compter que sur nous-mêmes, que nous devons aller de l'avant, qu'il nous faut construire les choses de nos propres mains et que nous pouvons être fiers de ce que nous réalisons personnellement.
Nous voulons décider, conserver le contrôle de ce qui peut nous arriver. Nous voulons faire ce que nous avons envie de faire quand nous le désirons, quand cela nous prend, et nous avons la ferme conviction que nous avons légitimement le droit de faire ce que nous avons décidé, au moment choisi par nous, où nous le voulons, avec qui nous le voulons...
Et nous avons cette fierté, c'est comme ça qu'on traduit le mot anglais pride si prisé de nos jours, qu'on peut aussi traduire par orgueil... Nous avons ce sentiment d'auto-suffisance qui nous remplit de ce que l'on appelle la réalisation de soi.

Cependant il arrive que certains obstacles soient plus durs à franchir que d'autres, ou soient parfois carrément infranchissables, voire reviennent comme par ironie devant nous, comme pour nous narguer, alors qu'on les croyait disparus. Ces obstacles qui  réduisent et limitent l'expansion que l'on voulait irrésistible de notre moi, peuvent être de tous ordres : matériels, techniques, financiers, physiques, physiologiques, sanitaires, accidentels, émotionnels, psychiques, familiaux, sociologiques, historiques, météorologiques... que sais-je ? Il y en a tellement !

Alors que fait-on ? Eh bien, selon les personnes - encore une fois - on se met en colère en croyant en nos forces, en nos ressources et nos compétences et on fait front, on se bat par tous les moyens, on s'arc-boute, on se défend, on lutte... ou bien on se met en colère mais différemment, plutôt dans le ressentiment, en rejetant la faute sur les autres, alors on s'indigne, on se révolte, on manifeste... ou bien on est tout à coup sans force, abattu, découragé voire désespéré, voire suicidaire, ou tout simplement on se résigne dans l'amertume...
Dans tous ces cas, on conserve la conviction que l'on peut, pourrait ou aurait pu contrôler notre vie et obtenir ce qui nous était dû, de par notre mérite ou de par notre droit le plus légitime et par une certaine idée de ce que doit ou devrait être la justice. 

Et bien souvent si l'on ne parvient pas à obtenir ce que nous désirions, alors nous faisons appel... aux autres ! Mais cela ne nous pose pas de problèmes, nous ne vivons pas cela comme une contradiction. Nous avons revendiqué jusque là notre capacité à contrôler notre vie et notre droit à obtenir, tout seuls, ce que nous voulions selon notre bon plaisir, sans nous préoccuper des autres, comme des grands ! Et nous continuons de le faire, même dans la difficulté et l'empêchement, et nous revendiquons, en même temps, sans état d'âme, le devoir des autres à s'occuper de nous, si nous sommes en panne...

Ainsi en est-il de tous ceux qui, à notre merveilleuse époque de progrès irrésistible, veulent prendre des risques dans la sécurité de l'assistance des autres, revendiquée politiquement, moralement et juridiquement comme incontournable. Ainsi en est-il de tous ceux qui jouent avec leur santé en s'adonnant à toutes sortes d'excès, ou en dépassant les bornes imposées par la nature, des sportifs qui veulent avoir les frissons de la proximité de la mort sans mourir aux femmes âgées qui veulent enfanter en s'apercevant brutalement qu'elles ont raté quelque chose d'important de leur vie sans avoir voulu au moment opportun sacrifier leur carrière ou leur collection d'amants ou leur physique avantageux, ou leurs convictions féministes... ainsi en est-il de tous ceux qui veulent s'enivrer sans retenue avec toutes sortes de substances et plongent dans l'enfer de la dépendance, ainsi en est-il de tous ceux qui veulent jouir sans entraves et sans précautions de tous les corps désirables, selon leur légitime préférence sexuelle, rencontrés sur leur passage. Ainsi en est-il de ceux qui veulent un corps parfait et toujours jeune, conforme en tous points aux canons de l'esthétique contemporaine et qui s'empoisonnent avec des médicaments incertains ou finissent par être défigurés ou handicapés par des techniques chirurgicales non encore éprouvées ou effectuées avec du matériel dont la fiabilité sanitaire n'a pas encore été  vérifiée. Ainsi en est-il même - on l'a vu tout récemment à grosse échelle - de ceux qui veulent prendre des risques financiers avec l'argent des autres tout en étant sécurisés par l'argent... des autres !

Alors se posent les véritables questions  : 
  • Qui contrôle quoi ? 
  • Qui contrôle vraiment quoi ? 
  • Qui est libre de quoi ?
  • Qui est responsable de quoi ?
  • Qui peut prétendre se passer des autres ?
  • Qui peut prétendre faire fi des autres ?
  • Qui peut être fier de quoi ?
  • Qui est dépendant de qui ?
  • Qui peut se passer du regard de qui ?
  • etc.

Une autre posture est celle de celui qui attend patiemment que les choses se passent toutes seules, dans un sentiment magique que tout arrivera comme par magie au moment voulu... C'est une des postures de la sagesse contemporaine... "ça va arriver, calmez-vous, soyez zen, ce que vous voulez va arriver, faites des visualisations, de la méditation, répétez des mantras spéciaux - sans oublier les stages, les accessoires, etc. et vous allez voir  : ce que vous voulez va arriver, vous retrouverez la santé, vous retrouverez l'amour, la prospérité, la jeunesse, la beauté..." 

Et puis il y a la posture de celui qui ne sait rien, ou qui sait que cette prétention au contrôle total, ou cette fuite de la réalité, sont vains, celui qui s'abandonne à la Volonté divine, à laquelle il ne comprend d'ailleurs rien, et dont il sait à peine comment elle peut s'exprimer, par quels moyens, à quel moment, par qui. 
Ce dernier s'occupe surtout de cultiver son jardin, c'est à dire d'abord de veiller aux besoins matériels et spirituels de sa famille, dans la mesure de ses moyens et compétences et puis de travailler sur soi, dans la mesure où il le peut, selon les talents qui lui ont été attribués dans sa vie depuis sa naissance et sa renaissance par le baptême, dans la conviction sans faille que ses propres efforts, même dans ce domaine spirituel seront vains sans la grâce de Dieu qu'il n'est même pas sûr d'obtenir. 

St Dismas le vrai confesseur
de ses péchés et de la divinité
du Christ
La véritable maîtrise de soi et de sa vie est dans la posture miraculeuse du Bon Larron, celui à qui Le Seigneur a assuré qu'il serait à l'instant même de sa mort dans son Royaume. Cloué dans l'impuissance totale à changer quoi que ce soit de sa vie, que ce soit de son passé de criminel, ou de son présent, cloué douloureusement sur le bois de la croix, ou de son avenir mortel proche, il tourne le regard vers Celui qui seul sauve, qui est "le Chemin, la Vérité et la Vie" - n'en déplaise aux bons esprits tolérants et bien pensants relativistes - après avoir reconnu ses fautes, après avoir confessé l'innocence de l'Agneau immolé en même temps paradoxalement que sa Toute Puissante Souveraineté, il s'abandonne à son Seigneur, dans la confiance et l'obéissance, avec cette prière :

Souviens-Toi de moi, Seigneur dans ton Royaume !
Μνήσθητί μου, Κύριε, ὅταν ἔλθῃς ἐν τῇ βασιλείᾳ Σου!
Помяни мя, Господи, во Царствии Твоем !

Celui qui a cette posture récite tous les matins en se levant cette courte prière extraite du Notre Père :
Que Ta Volonté soit faite !

et encore celle-ci extraite de la Grande Doxologie et judicieusement traduite par Geronda Placide :

Tu es béni Seigneur enseigne-moi ta Volonté
Tu es béni Maître, fais-moi comprendre Ta Volonté
Tu es béni Saint illumine-moi par Ta Volonté

vendredi 1 octobre 2010

8 points pour notre croissance spirituelle par l'Ancien Païssios


Voici des conseils de l'Ancien Païssios sur la croissance spirituelle en réponse à une demande de bénédiction par un visiteur. Bien que ces paroles semblent parfois s'adresser plus particulièrement à un moine, nous pouvons tous en bénéficier : 
  1.  Vous devez prendre soin de la purification de votre âme et ceci quotidiennement.
  2.  Vous devez acquérir la justice divine et non pas la logique, car alors seulement la grâce de notre Christ viendra à vous.
  3.  Avant de faire quelque chose, pensez "Est-ce que le Christ veut que je le fasse ?" agissez ensuite en conséquence.
  4.  Vous devez vous-même parfaitement pratiquer l'obéissance, pour pouvoir parler à d'autres plus tard au sujet de la vertu d'obéissance.
  5.  Le «non» que vous dites aux gens doit être un «non», et le «oui» doit être un «oui». Ne faites pas semblant, mais dites ce que vous pensez, même si ça fait mal à l'autre personne, cependant dîtes-le avec bonté , et ne laissez pas l'autre sans quelques explications.
  6.  Vous devez avoir et maintenir cette dignité spirituelle : faire toujours attention à ce qui plaît à vos compagnons moines et non pas à ce qui vous plaît.
  7.  Tous les jours, vous devriez lire un passage du Nouveau Testament pour la purification de votre âme.
  8.  Ne regardez pas ce que les autres font, ni n'examinez comment et pourquoi ils le font.Votre propre objectif est la purification de votre âme et la parfaite soumission de votre esprit à la grâce divine. Donc, privilégiez tout ce qui va dans le sens de votre objectif : prier, étudier, dire humblement la prière de Jésus, savoir que vous avez absolument besoin de la miséricorde de Dieu. En d'autres termes, faites attention à votre travail spirituel.